Revenir sur l’année 2019, c’est regarder les pays brûler au sens propre comme au sens figuré. L’Australie, pays continent en proie aux flammes, est en train de suffoquer sous des températures inédites, craignant pour ses ressources et son futur, et sur tous les autres continents, la température sociale est montée en flèche ces derniers mois.
La double pression écologique et démocratique a pris de court les gouvernants, incapables de s’organiser sérieusement lors d’une COP 25 inutile délocalisée du Chili à l’Espagne, pour cause de révolte populaire.
Hong Kong, Algérie, France, Liban, Iran, Irak, Chili, Venezuela, Haïti, Espagne, Équateur, Soudan, Égypte : la liste des pays en crise s’est allongée chaque mois en 2019, partout les peuples demandant plus de démocratie et rejetant leurs dirigeants déconnectés, qui essayaient tant bien que mal d’imposer de nouvelles taxes aux populations exsangues.
Partout les mêmes scènes de manifestations populaires, réprimées avec plus ou moins de violence et l’image catastrophique d’une classe dirigeante déconnectée, incapable de prévenir l’explosion sociale et attentiste face à la crise écologique.
En Iran, le régime des mollahs a choisi la répression sanglante, loin des caméras, plongeant le pays dans un black-out international encore plus poussé qu’à l’accoutumé. Au Chili, les vieux réflexes de la dictature ont vite repris le dessus, l’armée n’hésitant pas à tirer sur la foule, emprisonner, torturer ou violer les opposants. Le pouvoir algérien a mis en scène une sortie de crise prétendument démocratique, qui ne trompe personne. À Hong Kong, les manifestants de la liberté attendent un soutien international qui ne viendra pas et continuent une mobilisation sans précédent dans une spirale de violences. En France, à une année de manifestations hebdomadaires des gilets jaunes, succède une grève générale contre la réforme du régime des retraites.
Les populations ont compris, à l’image de la militante du climat Greta Thunberg, que les dirigeants ne résoudront pas les problèmes du monde et encore moins les inégalités galopantes. L’urgence écologique et démocratique est en train d’accélérer la transition dans le XXIème siècle : gouvernance internationale remise en cause, guerre commerciale des empires et raréfaction des ressources et de l’emploi. Les laissés pour compte de la croissance et les jeunes générations refusent l’avenir tracé et demandent à reprendre en main leurs démocraties.
A l’instabilité démocratique, s’ajoute une nouvelle ère d’instabilité économique.
Les dernières prévisions de croissance du Fonds Monétaire International (FMI) ont revu à la baisse l’anticipation de croissance au niveau mondial pour 2019, à 3 %, soit 0,3 point de moins que prévu en avril. C’est la croissance la plus faible depuis la crise financière de 2008.
Les explications du FMI tiennent compte de la tension mondiale, sur les marchés et dans chaque pays :
«Le tassement de la croissance est la conséquence de l’augmentation des obstacles au commerce, de l’incertitude accrue qui entoure les échanges commerciaux et la situation géopolitique, de facteurs spécifiques qui causent des tensions macroéconomiques dans plusieurs pays émergents et de facteurs structurels, dont une faible productivité et un vieillissement de la population dans les pays avancés».
Dans ce concert de révoltes populaires, les empires chinois, russe et américain semblent d’une solidité inébranlable. L’impeachement du président Trump n’est qu’une péripétie administrative, les élections se suivent et se ressemblent en Russie, et l’Empire du milieu continue son jeu de go sanglant avec des protestations démocratiques internes. Pourtant leur équilibre est fragile, au gré de la guerre économique et du ralentissement généralisé de la croissance.
Cette mondialisation des révoltes trouve sa source dans l’accroissement des inégalités, devenue insupportable pour la majorité, avec à chaque fois comme élément déclencheur la hausse ou la création d’une taxe que les gouvernants pensaient anodine. Les nouvelles générations ont grandi dans la défiance des pouvoirs en place, le rejet de la corruption comme mode de gouvernance et l’envie de participer autrement au débat démocratique que par le vote ou l’acceptation silencieuse.
La donne a changé, et si les discours se veulent rassurants de G7 en colloques onusiens ou bruxellois, la maison a bel et bien brûlé, et le temps est à l’alternative. Le TINA (There is no alternative) néolibéral et thatchérien fait figure de fossile idéologique et ne fait plus illusion.
Malgré le déferlement de violences répressives et les discours lénifiants, rien ne semble en mesure d’arrêter la vague populaire de réappropriation démocratique des outils de gouvernance et la préoccupation écologique devenue vitale.