Jeunesse et origines
Gérald Moussa Jean Darmanin est issu d’un milieu modeste et possède des racines algériennes et maltaises. Son père, Gérard Darmanin, gérait un bistrot nommé « Le Bonus » à Valenciennes, tandis que sa mère, Annie Ouakid, travaillait comme femme de ménage et concierge à Paris. Son grand-père maternel, Moussa Ouakid, était un adjudant-chef dans l’armée française, décoré de la Médaille militaire, et non un harki, contrairement à ce que Gérald Darmanin a parfois revendiqué. Cette affirmation erronée sur son grand-père a suscité des débats sur l’instrumentalisation de son histoire familiale.
Après le divorce de ses parents, Gérald grandit principalement à Paris auprès de sa mère, dans le 16e puis le 1er arrondissement, où elle était concierge pour la Banque de France. Il fréquente l’école privée catholique des Francs-Bourgeois, un établissement prestigieux, ce qui indique une stratégie familiale visant à lui offrir une éducation de qualité malgré des moyens modestes. Passionné par la politique dès l’adolescence, il annonce à 12 ans vouloir devenir député à 40 ans.
Il poursuit ses études à l’Institut catholique de Paris au sein duquel il décroche un DEUG d’histoire en 2002 avant d’intégrer Sciences Po Lille, où il se distingue par son ambition politique. Pour financer ses études, il exerce divers petits boulots, notamment chanteur de chansons françaises dans des bistrots parisiens, arbitre de football et veilleur de nuit.
Débuts en politique
Gérald Darmanin s’engage très tôt en politique. Dès l’âge de 16 ans, il adhère au Rassemblement pour la République (RPR), l’ancêtre des Républicains (LR). Son ascension y sera fulgurante. De 2005 à 2007, il est le collaborateur de Jacques Toubon, alors député européen avant de devenir en 2009, le responsable des affaires juridiques de Xavier Bertrand à l’UMP. Au même moment, et pour trois ans, il est promu directeur de campagne et chef de cabinet de David Douillet, alors ministre des Sports.
En 2012, à seulement 29 ans, il est élu député du Nord dans la 10e circonscription, devenant l’un des plus jeunes parlementaires de France. En 2014, il remporte la mairie de Tourcoing, une ville de 100 000 habitants, consolidant son ancrage local. Il devient également vice-président du conseil régional des Hauts-de-France en 2016.
Soutien de Nicolas Sarkozy, il dirige sa campagne pour la primaire de la droite en 2016. Cependant, face à l’affaire Fillon en 2017, il prend ses distances avec LR et rejoint Emmanuel Macron, une décision perçue comme une trahison.
Carrière ministérielle
Suite à son intégration au gouvernement d’Emmanuel Macron en 2017, Gérald Darmanin va occuper différents postes et ministères dont le premier sera celui de l’Action et des Comptes publics sous Édouard Philippe jusqu’en 2020. Il y supervise des réformes fiscales majeures, comme l’instauration du prélèvement à la source et la réduction du déficit budgétaire sous le seuil européen de 3 % du PIB. Il négocie également un accord avec Google pour un milliard d’euros afin de clore un litige fiscal.
De 2020 à 2024, il déménage place Beauvau et devient ministre de l’Intérieur sous Jean Castex, Élisabeth Borne et Gabriel Attal. Ses thèmes de prédilection seront la sécurité, la lutte contre le séparatisme et l’immigration illégale, avec des mesures comme l’expulsion de l’imam Hassan Iquioussen ou la dissolution de groupes extrémistes. Sa politique sécuritaire, marquée par des termes comme « ensauvagement », suscite de vives critiques.
Depuis décembre 2024, il occupe le fauteuil de ministre d’État en étant garde des Sceaux et ministre de la Justice dans le gouvernement de François Bayrou. Son objectif est de réformer la justice afin qu’elle puisse être « rapide, ferme et lisible ». Il souhaite ainsi mettre fin aux sursis répétitifs et que les courtes peines soient réellement exécutées.
Polémiques majeures
- Abus de pouvoir et de violences sexuelles
La carrière de Gérald Darmanin est jalonnée de controverses, souvent liées à ses prises de position et à ses choix de communication mais également consécutives à des accusations personnelles. Il fut en effet accusé, en 2017, d’abus de pouvoir et de violences sexuelles par Sophie Patterson-Spatz pour des faits remontant à 2019 lorsqu’il était chargé de mission à l’UMP. Il aurait alors marchandé une relation sexuelle en échange d’un appui pour réviser une condamnation judiciaire. L’enquête a abouti à un non-lieu en 2022 qui fut confirmé en appel en 2023, mais la plaignante se pourvoit aujourd’hui en cassation.
En 2018, une nouvelle affaire éclate lorsqu’une habitante de Tourcoing l’accuse d’abus de faiblesse, alléguant qu’il aurait sollicité des faveurs sexuelles en échange d’un logement. La plainte sera classée sans suite par la justice mais ces accusations ont suscité l’indignation de nombreux mouvements féministes, qui jugent sa nomination à l’Intérieur puis à la Justice incompatible avec ces allégations. Sa présence à la Justice est perçue comme un « signal inquiétant » pour les victimes de violences sexistes.
- Loi sur le séparatisme
En 2021, Darmanin publie un essai sur le « séparatisme islamiste », comparant sa politique à celle de Napoléon envers les Juifs, une analogie critiquée comme maladroite et assimilée à de l’antisémitisme d’État par certains commentateurs comme Naïm Sakhi et Sarah Benichou, respectivement journalistes pour l’Humanité et Mediapart. Ses mesures, comme la dissolution de groupes islamistes ou l’expulsion d’imams, ont été accusées de stigmatiser les musulmans, bien qu’il se prévale de lutter contre l’extrémisme.
- Usage du terme « ensauvagement »
En 2020, Gérald Darmanin utilise le mot « ensauvagement » pour décrire une partie de la société, un terme associé à l’extrême droite. Cette déclaration divise, y compris au sein de La République en marche, et est critiquée pour son ambiguïté et son potentiel à ethniciser l’insécurité.
- Loi immigration
En 2023, son projet de loi sur l’immigration, une promesse d’Emmanuel Macron, est rejeté par l’Assemblée nationale via une motion de La France Insoumise, un camouflet majeur. Gérald Darmanin est accusé par certains d’avoir tenté de « corrompre » des parlementaires pour faire passer le texte.
- Polémiques sur les conditions carcérales
En 2025, en tant que ministre de la Justice, Gérald Darmanin annule une visite à la prison de Nîmes après la découverte d’une table de massage en zone de détention, jugée inappropriée. Il met fin à des activités comme le « surf thérapeutique » pour détenus, estimant qu’elles manquent de respect aux victimes. Ces décisions, bien qu’applaudies par certains, sont critiquées par des organisations pour leur rigidité et leur caractère populiste.
- Opposition au mariage homosexuel
En 2017, des tweets de Gérald Darmanin datant de 2013, où il s’opposait au mariage homosexuel et soutenait La Manif pour tous, refont surface. Accusé d’homophobie, il exprime des regrets, invoquant son manque d’expérience. La polémique resurgit en 2020 lors de sa nomination au ministère de l’Intérieur.
- Affaire des supporters de Liverpool
En 2022, Gérald Darmanin attribue le chaos lors de la finale de la Ligue des champions à Paris aux supporters de Liverpool, une déclaration critiquée pour sa précipitation. En 2025, il présente ses excuses, reconnaissant son erreur.
- Carte d’identité en anglais
En 2021, il est épinglé par l’Académie de la Carpette anglaise, académie parodique décernant chaque année depuis 1999 un prix d’indignité civique à un membre des « élites » françaises, pour avoir introduit une carte d’identité sous-titrée uniquement en anglais, un choix perçu comme un manque de défense de la langue française.
Vie privée
Gérald Darmanin épouse Rose-Marie Devillers, directrice de conseil chez Havas, en 2020 à Tourcoing. Le couple a deux fils, Maximilien né en 2021 et Alec né l’année suivante. Catholique pratiquant, il affiche régulièrement sa foi, notamment lors de la fête de l’Assomption. Passionné de lecture, il cite souvent Nietzsche ou le cardinal de Retz et possède un étang de pêche à Saint-Amand-les-Eaux.
Ambitions pour 2027
Gérald Darmanin ne cache pas ses ambitions pour l’élection présidentielle de 2027. Il se positionne comme un héritier du gaullisme social, prônant une autorité forte, une politique économique favorable au travail et une empathie sociale. Ses réformes judiciaires et son discours sécuritaire visent à séduire un électorat en quête de fermeté, bien qu’il reste critiqué pour son opportunisme et ses prises de position clivantes.
Gérald Darmanin est assez paradoxal. Homme issu d’un milieu populaire qui gravit les échelons grâce à son ambition, ses choix et ses mots déclenchent régulièrement des tempêtes. Ses réformes sécuritaires et judiciaires, son discours sur l’immigration et sa gestion des polémiques reflètent une stratégie de communication offensive, parfois à la limite du populisme. S’il est apprécié pour son efficacité et sa proximité avec le terrain, il reste une figure clivante, accusée de trahir ses anciens alliés de LR et de manquer d’éthique face aux accusations qui le visent.