Plutôt que de s’intéresser à la dernière série à la mode «Emily in Paris», que faisait donc le financier pédocriminel à Paris lors de ses séjours ?
Les noms français du petit livre noir des contacts de Jeffrey Epstein sont nombreux et les accusations à l’encontre de son ancien associé Jean-Luc Brunel se multiplient, mais peu de noms des invités des dîners que le pédocriminel tenait avenue Foch dans son appartement parisien ont été révélés.
Pourtant, le financier passait plusieurs mois par an en France, souvent accompagné de Ghislaine Maxwell, sa complice actuellement en prison, et de ses esclaves sexuelles, comme en atteste une déposition de Virginia Giuffre.
À la demande de Ghislaine Maxwell, Virginia Giuffre avait été forcée de coucher avec le propriétaire d’une grande chaîne hôtelière en France, autour de la date où Naomi Campbell y fêtait son anniversaire, dans les années 2000.
Steve Bannon, Harvey Weinstein, le prince Andrews, l’ancien premier ministre Israélien Ehud Barak, le couple Bill et Melinda Gates sont tous passés chez Epstein à Paris selon son majordome, sans compter de nombreux politiques et hommes d’affaires.
Une étrange association française, composée de proches de Jack Lang, a été la seule en France à recevoir des financements de Jeffrey Epstein
Un nom est apparu immédiatement après l’arrestation d’Epstein, celui de Jack Lang, l’ancien ministre de la culture de François Mitterrand.
Jeffrey Epstein et Jack Lang se sont rencontrés il y a plusieurs années lors d’un dîner organisé en l’honneur de Woody Allen au domicile parisien de la princesse de Bourbon des Deux-Siciles.
«Epstein était une personne charmante, courtoise et agréable», avait déclaré Jack Lang à France Info en août 2019, en parlant d’une «relation de rencontre» et en ajoutant être «tombé de l’armoire en apprenant toutes ces histoires». Jack Lang avait aussi indiqué avoir convié Epstein à la célébration des 30 ans de la pyramide du Louvre, le 29 mars 2019, en présence de sa fille Caroline Lang.
Au-delà d’une relation de rencontre, le financier semble avoir investi en 2018 dans une association gérée par des proches de Jack Lang.
Ces dernières années, l’organisation à but non lucratif d’Epstein, «Gratitude America Ltd.» a investi dans une association parisienne : «L’Association Pour La Promotion De La Politique Culturelle Nationale Menée Dans Les Années 80 Et 90 Du XXème Siècle», ainsi que dans deux autres projets en Europe : une clinique du sexe à Rome et une compagnie de ballet lituanienne.
L’association française, qui n’a pas de site internet et aucune présence sur les réseaux sociaux, a été créée en 2018, l’année où elle a reçu 57 897 dollars de la part de Gratitude America.
Jacques Renard, le trésorier, était directeur adjoint et chef de cabinet du ministère de la Culture sous Jack Lang dans les années 80 et au début des années 90, après avoir eu une brillante carrière dans la culture.
Deux anciens collaborateurs de Jack Lang sont dirigeants de l’association, et un collaborateur actuel de Jack Lang, Fabrice Parsy, est également représentant du groupe.
Christophe Degruelle, président de l’association, est un conseiller municipal de Blois et président d’Agglopolys. Il a travaillé comme chef de cabinet de Lang au ministère de l’éducation de 2000 à 2002 et est resté un conseiller de Jack Lang à l’Institut du Monde Arabe.
Sylvie Aubry, fleuriste et ancienne fleuriste des palaces (Hôtels Meurice et Crillon) est secrétaire de l’association, domiciliée à l’adresse de sa boutique.
Reste à savoir quel est l’objet ce cette association culturelle, et en quoi elle a pu intéresser Epstein.
Les allers-retours de Jeffrey Epstein à Paris
Les dossiers de vol du jet privé d’Epstein indiquent qu’il s’est souvent rendu à Paris ces dernières années, y compris avant son arrestation.
Le 19 mars 2019, son avion a voyagé de New-York à Paris, puis a fait escale à Nice et à Vienne, selon les journaux de vol publiés par Business Insider.
Le 2 avril 2019, l’avion d’Epstein a fait la liaison de Paris à New-York, avant de revenir à Paris le 19 avril. De là, Epstein s’est rendu à Rabat, au Maroc, pour une seule journée le 25 avril. Il s’est ensuite envolé pour New-York trois jours plus tard.
Son dernier voyage à Paris a eu lieu le 14 juin. La petite amie d’Epstein, Karyna Shuliak, était à Paris avec lui avant son retour le 6 juillet lorsqu’il a été arrêté à l’aéroport de Teterboro. La biélorusse de 30 ans aurait été la dernière personne à parler à Epstein lors d’un appel téléphonique enregistré depuis la prison.
Les autorités américaines qui enquêtaient sur les voyages non signalés d’Epstein en Europe ont demandé l’aide des autorités françaises, monégasques, autrichiennes et marocaines, avant d’annuler ces demandes à la suite du suicide d’Epstein.
Une enquête au ralenti ?
Beaucoup de zones d’ombre subsistent dans la vie parisienne de Jeffrey Epstein et la justice française a commencé à enquêter sur Epstein en août 2019, après qu’il se soit suicidé aux États-Unis. L’enquête française «se concentre sur les crimes potentiels contre les victimes françaises commis sur le territoire national ainsi qu’à l’étranger (…) et sur les auteurs qui sont de nationalité française», avait déclaré le procureur de Paris Rémy Heitz lors de l’ouverture de l’enquête.
Aujourd’hui, Jean-Luc Brunel est introuvable et les auteurs de nationalité françaises sont inconnus du grand public.
Pourtant, plusieurs survivantes du trafic d’Epstein affirment avoir été violées à Paris.
Dans une déposition, Juliette Bryant, apprenti mannequin de 20 ans, a dit qu’Epstein l’avait utilisée pendant des années, abusant d’elle à plusieurs reprises dans son île des Caraïbes, à New-York, et y compris à Paris.
Une plainte déposée par Teala Davies dévoile qu’elle avait 17 ans lorsque le financier l’a violée en 2003 à Paris. Une autre plainte, d’une femme appelée «Mary Doe» allègue que le trafiquant l’a invitée «à rester chez lui à Paris avant de la violer». Anouska De Georgiou, mannequin et actrice britannique, a déclaré à la chaîne NBC qu’Epstein l’avait violée chez lui à Paris, à New-York et aux États-Unis.
Autant de dépositions qui pourraient faire avancer l’enquête, en attendant de nouveaux témoignages.