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Carlos Ghosn et les gilets jaunes : quand l’hypocrisie devient indigeste

Eva Morletto par Eva Morletto
23 novembre 2018
dans France, International, Opinion, Politique
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À l’époque où Emmanuel Macron était ministre de l’Économie de François Hollande, le salaire pharaonique de Carlos Ghosn avait déjà fait l’objet d’un important bras de fer avec le gouvernement. Pour le PDG du groupe Renault-Nissan, les 9 millions annuels de salaire n’étaient pas suffisants.

Pendant toutes ces années durant lesquelles Carlos Ghosn râlait et tapait du pied pour maintenir son salaire de nabab, sa société mettait à la porte des milliers d’ouvriers : le plan de 2013, par exemple, prévoyait 7500 licenciements.

Le bras de fer s’arrêta avec une victoire mitigée du gouvernement, car si le salaire diminua en effet, de facto Carlos Ghosn continua de percevoir ses millions. Ce qu’il ne touchait plus sous forme de salaire, il le percevait sous forme de dividendes, avec le silence complice du ministère de l’Économie.

Mais voilà qu’il y a quelques jours, les japonais, au travers de Nissan, sont intervenus et ont donné un tournant imprévu à cette histoire ordinaire de patrons avides animés par le sentiment d’être au-dessus des lois.

Carlos Ghosn a été arrêté à Tokyo pour fraude et utilisation des fonds de la société à des fins privées.

Avec un salaire de plus de sept millions annuels, évidemment Ghosn avait du mal à boucler ses fins de mois. Il semblerait donc qu’il ait mis les mains dans la caisse de Nissan et l’épilogue n’a pas été glorieux pour le patron franco-libano-brésilien : garde à vue prolongée et demande de démission de la part de Nissan et peut-être bientôt de Renault.

Le Japon est, avec le Danemark et quelques rares autres pays, une des nations où on essaye de contenir la différence entre les salaires les plus bas perçus dans une société et ceux perçus par les dirigeants. Le PDG d’une grande entreprise dépasse rarement les trois millions annuels de salaire.

Carlos Ghosn en percevait plus du double.

Maintenant c’est à la justice japonaise de faire la preuve de ces agissements.

Bruno Le Maire a assuré de son côté, sans aucune enquête apparente à l’appui, que les comptes fiscaux de Carlos Ghosn en France étaient transparents !

On peut dormir tranquille…

Mais pourquoi parler ici de Carlos Ghosn alors que mon sujet porte sur les gilets jaunes ?

Je pense que cette histoire peut permettre de mieux comprendre les raisons pour lesquelles toutes ces personnes descendent dans la rue pour bloquer la France depuis le 17 novembre en exprimant avec différents accents une colère commune, ce qui me rappelle précisément les débuts du mouvement Cinq Étoiles en Italie.

La raison officielle, tout le monde la connaît, c’est l’augmentation du prix des carburants, augmentation justifiée par le gouvernement au nom de la transition écologique.

Cette fin pourrait sembler noble et compréhensible si le discours se limitait à cet aspect. On ne pourrait que donner raison au coup de gueule de ce père de famille de Tours, Anthony Hamon, devenu une star des réseaux sociaux après avoir dit à peu près ça : «Personne ne descend dans la rue contre le réchauffement climatique, mon fils ne verra pas d’animaux sauvages sinon dans des livres, les produits de la terre sont empoisonnés par les pesticides et vous, ce qui vous révolte, c’est de payer l’essence plus chère?». Les mots étaient beaucoup plus percutants, mais le message était en gros celui-là. Et on est tous d’accord pour l’applaudir et convenir de ses raisons.

Sauf que le problème se révèle un peu plus compliqué.

Avant tout, il est nécessaire de rappeler que la province française et les communautés rurales se sentent abandonnées depuis des années par Paris et par les différentes politiques qui se sont succédées au sommet de l’État : abandon des campagnes, fermetures des écoles, des magasins et des centres culturels dans les petites municipalités, étouffement de l’économie agricole sous la pression appliquée des lobbies de l’agroalimentaire avec la complicité des institutions…

Ces thématiques ont toujours été sous-estimées, d’abord par les socialistes, puis par Emmanuel Macron, perçu comme «le Président des riches». La colère contre une élite indifférente aux souffrances des couches populaires s’est donc accentuée jusqu’à générer ce mouvement animé par des raisons hétérogènes, mais uni par une opposition envers la classe dirigeante.

L’augmentation du prix du carburant a été interprétée ainsi comme l’énième attaque vers les «provinciaux», vers les communautés rurales, alors que l’automobile n’est certainement pas un luxe pour eux, mais un moyen vital pour accéder aux services indispensables et pour exercer leurs professions.

Et que dire des raisons écologiques ?

Les gilets jaunes y voient aussi une énième façon de se moquer d’eux, de jouer avec leur bonne foi.

Et comment peut-on leur donner tort ?

Comment croire à une volonté sincère de changer les choses après la démission fracassante de Nicolas Hulot ? 

Après que Macron ait nommé comme secrétaire à l’écologie l’ex-lobbyiste de Danone Emmanuelle Wargon, avec ses prises de position sur l’huile de palme et les OGM.

Après que l’Assemblée ait refusé d’inscrire dans la loi la future interdiction du glyphosate et de légiférer sur les autres pesticides.

Après que les populations de Bure et des environs sont assiégées jour et nuit par les forces de l’ordre pour qu’on puisse continuer les travaux pour la construction de la plus grande décharge nucléaire enterrée d’Europe.

Après que des dizaines de milliards d’euros soient perdus dans les EPR.

Après que le ministre de l’Agriculture ait affirmé que les agricultures biologiques et conventionnelles étaient d’égales importances, au moment même ou une étude officielle confirmait qu’on a 25% de chances en moins de mourir d’un cancer en ne consommant que des produits bio !

Après que le Président ait concédé plus de facilités au lobby des chasseurs, malgré la diminution alarmante de la faune sauvage.

Que le gouvernement Macron se fasse soudainement des soucis pour l’environnement est une chose qui laisse perplexe sinon franchement sceptique.

Mais revenons un moment à Carlos Ghosn.

C’est à ses côtés qu’Emmanuel Macron s’est présenté devant les ouvriers de l’usine Renault de Maubeuge, pendant la semaine de l’itinérance dans le nord-est du pays à l’occasion des commémorations de la Grande Guerre.

Ils se sont présentés ensemble pour parler emploi, pouvoir d’achat et écologie.

Mais c’est là-bas qu’un syndicaliste du syndicat sud s’est adressé au Président en lui lançant : «Nous n’avons pas besoin de vous…». Le divorce avec le chef de l’État était déjà acté.

Le Président était là pour annoncer de nouveaux emplois grâce au projet de la construction de voitures électriques. Mais cette annonce arrivait trop tard, le mouvement des gilets jaunes était déjà en train de germer. «Les élites nous donnent des miettes et nous, on devrait rester silencieux et remercier !».

Cette phrase, on l’entendit comme un mantra ce jour-là, prononcée à chaque fois avec une indignation plus forte.

Carlos Ghosn a été arrêté au Japon, en France il apparaît comme un intouchable. Contrairement à l’Inde et à ses parias maudits, ici les intouchables sont «les premiers de cordée», les plus riches, ceux qui, malgré leurs actes ont un destin nimbé d’impunité.

Cette arrestation pour fraude de la part d’un ultra-riche, comparée à ces gens qui protestent dans le froid au milieu des carrefours, avec leurs gilets fluo et leurs voix brisées et qui dénoncent le manque d’argent et de reconnaissance, nous offre l’image de l’absurdité de ce monde fou où l’on vit.

L’arrestation de Carlos Ghosn met une fois encore le doigt dans cette gigantesque plaie qu’est l’hypocrisie. C’est cela, que les gilets jaunes n’acceptent plus.

Article de Eva Morletto, publié sur notre partenaire Da Vinci Post 

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Journaliste et reporter depuis plus de 15 ans, Eva a été directrice éditoriale en Italie pour le magazine Life Club dédié à l’art de vivre et journaliste auprès de la boite de production « Filodiretto » pour qui elle a notamment réalisé différents documentaires sur les effets de la guerre dans l’Ex-Yougoslavie. En 2006 elle est arrivée à Paris comme reporter et news-producer pour la chaine de télévision japonaise FUJI TV. Après plusieurs années, elle est devenue correspondante pour Radio Montecarlo, elle a travaillé pour l’hebdomadaire d’actualité Famiglia Cristiana et pour le magazine GQ du groupe Condé Nast. En France elle collabore ponctuellement avec Radio France Culture, Radio France International, TV 5 Monde, CNews, Arte. En 2018 elle a gagné le prix « Reporter de Paix » auprès du Festival de Journalisme italien « Forum of Mediterranean Women Journalists », grâce à ses multiples reportages sur le djihadisme en France et sur la radicalisation. Aujourd’hui elle travaille régulièrement avec GRAZIA. Pour cet hebdomadaire italien, elle s’occupe d’actualité française, avec un oeil attentif sur les enjeux écologiques et les droits des femmes. Parallèlement à son activité journalistique, elle exerce comme traductrice et biographe privée. eva.morletto@gmail.com

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