Opinion de Baptiste Delescluze
Yannick Jadot aimerait-il trop Cédric Villani pour être honnête ? La «coalition climat» est-elle un piège qui va se refermer sur les écolos ?
L’écologie qui tolère le libre-échange et la pensée productiviste, qui, par principe n’ont que peu d’intérêt pour la santé de la planète tant que les actionnaires sont à la fête. Quelle mauvaise blague…
Pendant ce temps-là, celui des petits calculs politiques, la planète se meurt chaque jour un peu plus rapidement.
La ligne choisie par Jadot est celle du néant de l’écologie politique, celle du compromis. Une écologie politicienne qui se confine à murmurer quelques mesurettes à l’oreille des décideurs, quand la réalité de l’urgence climatique nécessite d’imposer un nouveau modèle politique en tapant sur la table et en sifflant la fin d’un système écocide.
Cette ligne est celle de ceux qui sont prêts à compromettre les valeurs et les combats qu’ils affichent, uniquement pour accéder aux plus hautes sphères du pouvoir. Elle conduira l’écologie politique au néant, comme le compromis historique d’une partie du PS avec les idées et les combats de gauche a conduit ce parti dans l’abîme, au moment même où François Hollande accédait à l’Élysée.
Il y a un parallélisme certain entre vouloir verdir le capitalisme et vouloir le rendre plus social : c’est de le laisser subsister, lui offrir une respiration, avant qu’il ne reprenne de plus belle. C’est de laisser le pouvoir dans les mains de ceux qui l’exercent déjà, en pensant pouvoir changer leurs intentions, influencer leurs décisions.
C’est aussi accepter le mensonge de la «transition écologique», comme certains accepteraient celui d’un «libéralisme social». La transition est un moment temporaire entre deux états. En l’occurrence, rien ni personne ne définit l’état qui succédera au capitalisme de surconsommation. La transition écologique proposée aujourd’hui est en réalité un «non-état», un flou, qui permet d’éviter la question politique du choix de société.
Il faut être clair : le capitalisme est contraire à la protection de l’environnement, il est celui du partage des richesses. Il en est l’ennemi par essence. Le capitalisme ne reconnaît, n’admet et ne pratique que son dogme. Celui du rendement et de la productivité. Celui de l’enrichissement des plus riches, par l’exploitation du travail et de ce qu’ils considèrent comme une ressource comme une autre : la nature, l’eau, l’air, la vie.
Telle est l’erreur de Jadot. Se jeter dans la gueule du loup, à l’heure où l’urgence est de le combattre avec la plus grande fermeté.
Je ne parle pas ici de radicalité. Affirmer une ligne idéologique et la respecter n’est pas radical. C’est tout l’inverse. Le compromis, lorsqu’il est idéologique, est un début de renoncement. C’est ce qu’il faut dénoncer. C’est ce qu’il faut comprendre. Le compromis idéologique n’est pas une une démonstration stratégique. Ni un premier pas vers son objectif. C’est aller dans le mur et perdre la partie avant même de l’avoir jouée.
La colère de certains militants verts face à la stratégie de Jadot est donc compréhensible. Plus encore, elle est saine, tant l’erreur est historique.
Que ces militants se rassurent néanmoins : l’écologie politique n’appartient ni à un homme, ni à un parti, tout vert soit-il. Et si EELV renonce avant la bataille, nul doute qu’elle sera menée par d’autres avec la force de la conviction et le sentiment d’urgence qui incombent au combat écologique.