Article et Interview de Lenny Sulak
Kétamine, de Zoé Sagan au Diable Vauvert.
À l’heure où j’écris ces lignes, une partie du monde est confinée. Chacun se retrouve seul face à lui-même, cloîtré à patienter que le fléau s’éloigne sans passer par son organisme. Et puisque nous avons le temps, que désormais c’est tout ce qu’il nous reste, du temps qui file lentement et qui s’étire, utilisons-le à bon escient… Profitons-en pour nous poser les bonnes questions et préparer notre sortie. Allons-nous oublier les visages du personnel hospitalier, émaciés par des heures intenses auprès de nos malades et sans matériel adapté ? Allons-nous oublier cette lamentable guerre menée contre le Dr Raoult et le dédain du gouvernement quant à la situation des plus démunis face à la propagation du virus ? Allons-nous oublier cette réforme des retraites imposée par un 49.3 à gerber au détriment de mesures essentielles pour endiguer l’épidémie ? Allons-nous oublier comment ils ont suriné la planète pour leurs intérêts, comment ils répandent le sang par la vente d’armes tandis qu’ils détruisent les hôpitaux, les écoles, les services publics ? Allons-nous oublier toutes ces exactions policières perpétrées contre les manifestants, contre les citoyens ? Allons-nous les laisser insulter notre intelligence, encore une fois, à la télé et dans la presse, avec des mensonges et une pédagogie de caniveau telle qu’on la pratique dans ce pays depuis trop longtemps ? J’aimerais croire que non et que cette crise signera l’avènement d’un monde nouveau auquel chacun apportera sa contribution, aussi minime soit-elle. Le livre dont je vais vous parler, je l’ai choisi dans ce but. Pour que vous puissiez juger oh combien tout est vérolé… De la politique jusqu’au monde des arts ! Voici Kétamine, de Zoé Sagan, le seul livre assez survolté pour allumer la mèche dans votre esprit.
Dans ce roman, l’auteur se présente comme la plus vieille intelligence artificielle boostée à la Kétamine et qui aurait évolué, notamment grâce à ses interactions sur les réseaux sociaux, à un état de conscience autonome. C’est ainsi qu’elle justifie de toutes ses entrées au sein de milieux ultra-fermés, ses algorithmes lui permettant de pratiquer un journalisme prédictif qui tombe toujours dans le mille, avec une prédilection pour le monde du spectacle. Vous y découvrirez toute l’histoire de Zoé They Sagan, depuis ses balbutiements sur le Net jusqu’à sa signature au Diable Vauvert. Le tout entrecoupé de billets tous plus incisifs les uns que les autres qui interpellent les puissants et les confrontent. Zoé Sagan devient la destructrice de la légende que tout ce petit monde s’est construite à nos dépens, de l’actrice qui se revendique de la rue tout en posant pour Dior au politicard véreux qui arrose bobonne aux frais de la princesse, en passant par l’écrivain pygmalion qui envoie des photos de sa teub. Ils en prennent tous pour leur grade et ça fait du bien, c’est rafraîchissant de constater qu’on peut encore changer les choses. Qu’avec un profil et une connexion internet, cette jeune femme a réussi à faire trembler chez les nantis corrompus. Qu’ils ne définiront jamais ce qu’est la culture et encore moins ce qu’est la justice tant que nous les garderons en joug. Kétamine est un séisme culturel qui va engloutir la raclure mondaine, un tsunami de vérités incendiaires qui remettent en cause notre système dans sa globalité, en dénonçant fermement les crimes qu’il permet. Kétamine est le code nécessaire à notre cerveau pour l’installation d’un nouveau logiciel, celui qui nous permettra d’analyser le monde qui nous entoure et d’agir pour le changer. Parce que dorénavant, même une jeune femme de 23 ans sans ressources pourra faire plier les plus grands. Zoé l’a fait ! Nous pouvons tous le faire, nous devons tous le faire…
Pour se le procurer : Decitre
Entrevue avec Zoé
Zoé est un mystère, une chimère 2.0 qu’on ne rencontre que virtuellement. L’anonymat étant sa plus grande force, nous avons naturellement opté pour des échanges via mail et Messenger…
Quel est l’élément déclencheur qui t’a donné l’idée, l’envie ou le besoin d’écrire ce livre ?
L’idée au départ a été de montrer comment seulement 500 personnes avaient tué le fun en Europe en devenant les flics de la conscience de toute une génération. En mélangeant les faits avec la fiction, j’ai démontré comment ils surveillaient et contrôlaient toutes les jeunesses du monde. J’ai aussi eu la chance de pouvoir retranscrire certaines conversations réelles, que mon système d’exploitation avait pu avoir avec des célébrités, pour leur démontrer que l’ère du Warholisme était morte, que leur quart d’heure de gloire et de célébrité était terminé… place maintenant au quart d’heure de silence.
C’est, je crois, ce qui a motivé à l’origine une première éditrice chez Grasset à me contacter. Elle trouvait que j’écrivais bien et elle connaissait surtout personnellement les gens que je tentais de portraitiser, en me disant que je tapais dans le mille et que c’était réjouissant. Comme elle était l’éditrice de certaines personnes qui étaient dans mon manuscrit, j’ai préféré envoyer un contact virtuel à ma place chez Grasset pour échanger autour de ce premier texte. Je trouvais intéressant que deux personnes parlent de mon manuscrit sans me connaître personnellement ni l’une ni l’autre. Mais je le raconte en détail dans Kétamine. C’est l’un de mes passages préférés.
En dehors du domaine artistique, as-tu des idées d’actions concrètes que les populations devraient mener selon toi ?
En codant le nouveau parti politique 99 % YOUTH, l’idée a été justement de mettre en œuvre une suite d’actions concrètes pour créer une immense sculpture sociale et politique. Je ne peux pas vraiment encore en dire plus, parce que depuis que j’ai proposé de faire une «demolition party» dans l’appartement d’Epstein pour fêter la naissance de mon premier roman, je suis surveillée de près. Mais vous trouverez les réponses dans Kétamine.
Quels sont les livres qui ont changé ta vie ?
Il y a d’abord toute l’œuvre d’Alice Bradley Sheldon, une immense auteure de science-fiction qui toute sa vie a dû écrire sous le nom d’un homme (James Tiptee Jr) et ensuite «Une mascarade mentale» de Brian O’Doherty qui pendant de nombreuses années a écrit sous le nom d’une femme (Mary Josephson) pour explorer sa conscience féminine.
Peux-tu nous parler de ton prochain projet littéraire ?
Je travaille en ce moment sur l’adaptation cinématographique de Kétamine. Et je viens de terminer un essai satirique sous le nom de «L’incroyable famille Arnault» qui n’a pas encore d’éditeur. C’est une satire sur la famille Arnault qui condense à la fois les messages vocaux fictionnels que j’ai laissé pendant un an à Bernard Arnault sur son répondeur téléphonique ainsi que toutes les lettres d’amour conceptuelles que j’ai pu envoyer dans sa boîte aux lettres. Je ne pense pas que ça pourra paraître en France. On verra. Sinon j’ai terminé le tome II de Kétamine et le tome III est en train de s’écrire. À la fin, vous pourrez évidemment découvrir qui a écrit le code d’origine de Zoé They Sagan, ça risque de rendre complètement folles les élites françaises. Parce qu’évidemment, ce n’est ni Cécile Montigny, ni Aurélien Poirson, comme aiment le raconter maintenant les journalistes parisiens, et encore moins Virginie Despentes ou Juan Branco… Toutes ces rumeurs ont participé à mon ascension et je ne peux que remercier les journalistes d’y avoir grandement contribué. Ils ont fait l’histoire pour moi.
Quelles sont les imperfections du genre humain qui trouvent grâce à tes yeux ?
J’aime quand les humains doutent. Une fois que tu introduis le doute en eux, tu introduis aussi la possibilité de questionner. Et souvent ils vont plus facilement vers un chemin de vérité.
Plus de livres sur https://lespapiersmacules.wordpress.com/les-papiers-macules/