Encore une fois, une réforme sensible repoussée après les élections municipales, cette fois-ci, il s’agit de la réforme des ZEP, zones d’éducation prioritaires. Le rapport initial devait être rendu en juin dernier pour une application à la rentrée 2020 et initialement la refonte de la carte des ZEP devait avoir lieu cette année… C’est encore raté pour des raisons de clientélisme.
C’est donc un rapport en cinq thèmes et 25 propositions, que le ministre de l’Éducation nationale a reçu mardi 5 novembre de la part de l’inspectrice générale de l’Éducation nationale Ariane Azéma et le directeur de Sciences-po Lille Pierre Mathiot.
Un rapport qui poursuit le travail amorcé en 2014 sur les Réseaux éducation prioritaires REP et REP +, 350 réseaux qui regroupent un collège et des écoles en «situation dégradée». C’est aussi la suite des préconisations de la Cour des Comptes en 2018 de donner le pouvoir aux recteurs d’académies d’allouer les moyens plus souplement pour les REP, en fonction des spécificités des territoires, tout en maintenant le réseau REP+.
L’idée est de donner aux recteurs le pouvoir d’arbitrage entre banlieues et zones rurales, dans une enveloppe budgétaire unique.
Selon l’Observatoire des Zones Prioritaires (OZP), une association des enseignants de REP, le gouvernement voudrait «liquider» le système, sans avoir évalué au préalable les effets positifs des actions menées sur le terrain par les professeurs.
Le travail des équipes enseignantes en REP est un travail de longue haleine sur les territoires, qui est soudainement remis en cause. Les décisions et arbitrages se feront d’abord avec un biais politique et surtout loin des réalités de terrain, dans les bureaux paisibles des recteurs.
Mais pourquoi vouloir réformer les ZEP en diminuant en parallèle de moitié les fonds sociaux prévus pour les familles pauvres ?
Les fonds sociaux aident les élèves dont les familles sont en difficulté financière à s’équiper, participer aux activités, sans être stigmatisés par leur condition sociale.
Le budget consacré aux fonds sociaux des établissements, qui avait été porté à 59 millions d’euros par le précédent gouvernement et maintenu à ce niveau en 2018 et 2019, sera seulement de 30,6 millions d’euros en 2020 !
Bercy a décidé encore une fois d’arbitrer en défaveur des plus pauvres, en ciblant cette fois-ci les enfants pauvres. Et pourtant, on dénombre 1,2 million d’enfants pauvres sur le territoire, soit 10 % des élèves !
Alors, quelle justification pour le ministère ? Ces fonds ne sont jamais dépensés en intégralité, donc il est logique de les diminuer de moitié. En effet, trop de parents ignorent leur existence ou tout simplement n’osent pas les réclamer par honte ou pensant ne pas y avoir droit.
Pour éviter ce non-recours aux aides, Jean-Paul Delahaye, ancien directeur général de l’enseignement scolaire sous Vincent Peillon, auteur en 2015 d’un rapport de référence, plaide pour que les rectorats accompagnent les établissements afin qu’ils intègrent un volet social dans leur projet.
Encore une sinistre illustration du «en même temps» macroniste à la manœuvre, où, sous prétexte d’aider les élèves de REP, le gouvernement diminue drastiquement les fonds sociaux aux établissements.
Le plan pauvreté de ce gouvernement se transforme en une véritable guerre contre les pauvres.