Goodyear, Arcelor, Continental, Whirlpool, Bridgestone, la litanie est longue et c’est toujours le même cirque triste que l’on sert aux salariés mis sur le carreau : un ballet impeccable de politiques éplorés, soudain révoltés, annonçant que «non cette fois, ça ne se passera pas comme ça» et «qu’ils mettront tout en œuvre pour sauver les emplois».
Comment croire un seul instant en la sincérité de ces chantres de la mondialisation heureuse qui hier encore n’avaient que «compétition» comme seul mot à la bouche ?
863 salariés risquent de perdre leur emploi, et la seule réponse du gouvernement est de mandater Accenture, un cabinet de conseil, pour évaluer les alternatives à une fermeture du site.
D’alternative, dans le logiciel unique de la concurrence libre et non faussée, il n’y en a pas.
Les entreprises sont libres de faire ce qu’elles veulent en matière de domiciliation des lieux de production ou des sièges sociaux. Pour les entreprises mondialisées, le corollaire au nomadisme productiviste est la domiciliation juridique dans les paradis fiscaux. Et nos politiques impotents n’ont jamais fait les lois pour lutter contre les paradis fiscaux intra-européens et encore moins contre le dumping social. Le modèle européen jusqu’à peu était la directive «Bolkenstein», celle des travailleurs détachés, qui permettait de profiter de la concurrence des plus bas salaires au sein de l’espace européen.
Rien non plus dans les traités, pour protéger les frontières du marché unique à la concurrence féroce de la Chine, qui en matière de pneus, comme dans d’autres domaines (photovoltaïque), fait la politique de la casse des prix ! Non, l’Europe négocie des traités de libre-échange, c’est son rôle premier. Ensuite, au sein de l’espace intra-européen, l’UE laisse faire la loi du marché, comme seule règle essentielle à la régulation.
Nous ne sommes pas armés pour faire face aux oukases américains ou chinois, car nos entreprises du CAC 40 sont elles aussi mondialisées, et elles ont besoin de débouchés à l’international.
Laurent Dartoux, président et directeur général de Bridgestone , expliquait à l’AFP que «la part de marché des producteurs asiatiques est passée de 6% à 25% entre 2000 et 2018», et que l’usine était en surcapacité de production, stockant des pneus sans pouvoir les vendre.
Surproduction, délocalisation, compétition, voilà ce à quoi les politiques devraient répondre par une politique sociale, protectionniste et écologiste, mais de la part de bons élèves de la mondialisation et de l’atlantisme triomphant, rien à attendre que de polies jérémiades et des mensonges productivistes patriotes.