Le plan de relance présenté ce jeudi par le gouvernement comprend trois grandes priorités : la reconquête industrielle, la transition énergétique et le soutien à l’emploi. Mais un quatrième volet, celui des réformes, n’est jamais clairement abordé, et le volet social, est quasi inexistant. Une fois encore, le gouvernement fait le choix des profits avant les familles : des milliards pour les entreprises et seulement 200 millions pour le plan pauvreté et anti-exclusion.
«La priorité c’est l’emploi mais il n’est pas question de mettre la poussière sous le tapis au sujet des retraites».
Jean Castex
Les Français sont prévenus, ce «plan de relance» est avant tout un cheval de Troie de l’agenda de Bruxelles et une manière de faire passer en force les réformes du quinquennat rejetées par une majorité des partenaires sociaux.
100 milliards d’euros pour faire campagne ?
L’argent doit aller en priorité aux entreprises et sauver leur compétitivité, plus qu’un plan de relance, c’est une bouée financée par les populations pour sauver un système de surproduction à bout de souffle et éviter un bilan catastrophique en 2022 aux amateurs fiers qui nous gouvernent.
Le dispositif de l’activité partielle doit éviter les licenciements grâce à un «bouclier anti-chômage», déployé via l’activité partielle de longue durée (6,6 milliards) et un renforcement des moyens du dispositif FNE-Formation, axé sur les secteurs d’avenir (1 milliard).
«Certaines entreprises vont licencier alors on va leur dire : ‘formez plutôt que licenciez, mettez vos salariés dans le dispositif activité partielle de longue durée’. 84% des salaires net des salariés sera alors pris en charge par le plan de relance», selon Jean Castex.
L’exécutif prévoit 160 000 créations d’emplois en 2021 et 240 000 emplois en 2022. Le taux de chômage, au-dessus des 10% l’an prochain pourrait ainsi repasser sous ce seuil symbolique au début de 2022, juste à temps pour les présidentielles.
Mais que sont 160 000 créations d’emplois face aux millions d’emplois en danger ? Et toutes ces aides aux entreprises, comme un nouveau CICE, sont bien évidemment sans contreparties réelles de la part des entreprises. Un plan fait sur mesure pour financer des «plans sociaux» à moindre frais pour sauver la fine fleur du capitalisme français.
À part une enveloppe de 385 millions pour la transition numérique et la baisse des impôts de production, bien peu de place est faite aux TPE et PME dans le plan de relance. C’est donc bien un «plan de sauvetage de la bulle financière» et non pas de l’emploi qui se met en place.
Le calendrier est important, une fois venu 2022, le gouvernement pourra présenter des chiffres embellis du chômage et se féliciter de ce plan coûteux et peu efficace en matière de lutte contre le déclassement social et la pauvreté. Une campagne financée sans peine !
Sauvez les profits avant les familles !
Les aides à la relance sont concentrées sur les entreprises, sans contrepartie de création ou de protection des emplois.
Serge Weinberg, président du conseil d’administration de Sanofi et proche d’Emmanuel Macron (il le fit entrer à la banque Rotschild et lui conseilla d’entrer en politique) se félicitait ce matin sur BFM Business de la baisse des impôts de production : 10 milliards d’euros de baisse pour 2021, avec prolongation en 2022.
Pour le volet social, le plan se limite à la hausse de l’allocation de rentrée scolaire de 100 euros par enfant scolarisé accordée aux trois millions de familles les moins aisées et le passage à 1 euro le repas dans les Crous pour les étudiants boursiers.
Le plan pauvreté et anti-exclusion reçoit 200 millions d’euros supplémentaires. Avec le risque de faillites, de pertes d’emplois et d’expulsions locatives, c’est un objectif peu ambitieux qui montre encore une fois que le gouvernement fait le choix politique de la pauvreté.
Un plan au financement douteux
Sur les 100 milliards promis, 40 milliards proviennent du financement européen.
Ces 40 milliards représentent la part de la France dans le plan de relance européen de 390 milliards d’euros de subvention. Mais ce plan de relance européen n’a pas encore d’existence réelle, son processus de ratification est en cours et doit être validé par l’ensemble des états membres.
Le plan français devra d’abord recevoir l’approbation de la Commission Européenne, ainsi que celle d’une majorité qualifiée des États membres et cela implique la réalisation de réformes structurelles – les retraites – pour pouvoir recevoir l’argent européen en 2021.
L’argent débloqué par l’Union européenne est un emprunt et rien n’indique dans les textes que son remboursement sera réalisé grâce à de nouvelles ressources propres de l’Union telles que la taxe GAFA ou les taxes aux frontières. La France s’engage donc dans un processus flou dont l’issue pourrait être un remboursement par les États à hauteur de leur contribution au budget européen, soit 17% pour la France.
Sur les 390 milliards, il s’agit de 66 milliards que la France pourrait être amenée à rembourser pour recevoir 40 milliards. Étrange calcul et défaite de la négociation présentée en victoire au cœur de l’été.
Et la dette, aussi exceptionnelle soit-elle, devra être remboursée.
Pour l’ex-dirigeant de la Banque Centrale Européenne, Mario Draghi :
«La dette créée par la pandémie est sans précédent et devra être remboursée, principalement par les jeunes d’aujourd’hui».
Et Christine Lagarde, l’actuelle présidente de la Banque Centrale Européenne avait, dès avril, rejeté l’idée d’une annulation globale des dettes contractées par les États de la zone euro dans leur gestion de la pandémie du coronavirus.
Une stratégie du choc bien orchestrée.