Entretien avec Camille Herlin Giret, chargée de recherche en sciences politiques au CNRS.
Note publiée par Intérêt Général, laboratoire d’idées

Les droits de succession ne concernent que très peu de monde, pas plus d’un quart des individus si l’on tient compte de l’abattement de 100 000 euros appliqué à chaque succession. Du fait de la multiplication des régimes dérogatoires, l’impôt rate aujourd’hui sa cible principale, à savoir les successions les plus importantes.
En France, en 2018, les 10 % des ménages ayant les patrimoines les plus importants, soit ceux qui possèdent plus de 607 700 euros de patrimoine brut, détiennent près de la moitié de l’ensemble des actifs patrimoniaux. Les 10% les moins dotés patrimonialement ne possèdent rien, ou presque rien (0,007 % de l’ensemble des actifs patrimoniaux et moins de 3 800 euros par ménage). Le patrimoine net médian des ménages est quant à lui de 117 000 euros.
Nicolas Frémeaux estime à partir de l’Enquête Patrimoine (2014-15) de l’Insee qu’un tiers des individus n’héritera jamais de rien. Parmi celles et ceux qui ont hérité, la moitié ne recevra pas plus de 8 500 euros en moyenne. Au final, il estime qu’un tiers des individus sont susceptibles d’hériter d’un patrimoine significatif (en moyenne supérieur à ce montant).
L’imposition des transmissions de patrimoine a conduit à collecter 12,5 milliards d’euros en 2015, soit plus du double de l’ISF à la même date mais 8,8% des recettes de la TVA et près de six fois moins que celles de l’impôt sur le revenu (et 7,5 fois moins que la CSG, contribution sociale généralisée).
On parle en ce moment encore du Luxembourg comme un paradis fiscal, avec Open Lux et l’enquête du Monde et de 16 médias partenaires qui nous apprend que 37 des 50 plus grandes fortunes françaises ont logé plus de 100 milliards d’avoirs (4% du PIB français) au Luxembourg. En matière d’héritage, comme en matière d’évitement de l’impôt, les ultra-riches ont-ils des stratégies de préservation du capital ?
Pourquoi les gouvernements ont fait de la taxe sur l’héritage un tabou ?
Pourquoi faut-il taxer l’héritage et les donations ?