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Vandana Shiva

Vandana Shiva : David contre Goliath

Eva Morletto par Eva Morletto
23 mai 2020
dans Écologie, International, Opinion
Reading Time: 7 mins read
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Interview de Vandana Shiva par Eva Morletto

Lorsqu’on la définit comme «icône planétaire des mouvements écologistes», Vandana Shiva rit timidement, comme pourrait le faire une copine à qui tu adresses un compliment exagéré. «Mes parents m’ont appris à ne jamais céder, à ne pas me décourager face aux obstacles, c’est en grande partie leur mérite si aujourd’hui j’ai obtenu gain de cause dans une grande partie de mes batailles».

Les obstacles, Vandana, les connaît bien. Elle en a rencontré beaucoup, durant la lutte contre les géants des multinationales qui voulaient imposer en Inde leurs lois, et lors de sa longue bataille au nom de l’eco-féminisme, pour donner plus de place aux femmes dans le monde culturel, économique et dans l’agriculture.

David contre Goliath. Les «big corporations» et la dame indienne au sourire amical et au sari étincelant : un combat où on aurait vite fait de parier sur les premiers. À tort.

Elle a réussi à faire reculer Coca-Cola, responsable en Inde d’épuiser les sources d’eau pour la production de son célèbre soda. «L’usine pompait dans la nappe phréatique plus d’un million de litres par jour» précise Vandana, encore indignée par l’exploitation massive des sources d’eau douce, denrée qui devient de plus en plus rare dans un pays qui, asséché par le dérèglement des moussons, a risqué l’an dernier de voir mourir de soif des milliers de villageois.

Une autre lutte l’a portée à se confronter à Monsanto. Pendant les années 1990, la multinationale a appuyé la «révolution verte», on l’appelait ainsi mais ça signifiait en réalité  le passage d’une agriculture paysanne à une agriculture de type intensif. Pas grand chose à voir avec le «vert», donc. Pour acheter les graines industrielles, les paysans indiens se sont ainsi endettés de façon irréversible. Leurs droits sont devenus pour Vandana un combat fondamental.

«Les grandes entreprises pensent que même la vie, représentée par les graines, leur appartient, mais la vie n’appartient à personne, ils n’ont pas le droit, tout simplement de privatiser la vie, de rendre artificielle la régénération de la nature». Elle est, encore et toujours, remontée contre la toute-puissance du géant de l’agrochimie.

Aujourd’hui, Vandana Shiva regarde vers le futur et espère que la pandémie de Covid-19 et les bouleversements planétaires qu’elle a généré, puissent se révéler un point de départ concret pour une réflexion profonde sur le monde de demain.

«Cette crise nous a appris que la Terre appartient à tout le monde, pas seulement aux êtres humains. Il suffit de voir comment pendant ces deux mois, la faune sauvage a repeuplé les campagnes et parfois les villes, désertées par les personnes. Il faut rester vigilants, on ne peut pas définir précisément cette pandémie comme d’origine naturelle : l’homme a contribué largement à sa diffusion, il a eu un rôle central. Depuis des années, on élimine les zones intermédiaires entre l’habitat naturel de la faune sauvage et les zones urbaines, chaque année on grignote un peu plus, cela a certainement contribué au passage du virus de l’animal à l’homme».

Il est en effet prouvé que les éléments pathogènes ont favorisé les épidémies de ces 50 dernières années, d’Ebola au Sars, en passant par le Covid-19, ont aussi été le fruit – entre autres conséquences – de la déforestation massive et de l’élevage intensif.

«Plus l’équilibre de la biodiversité sera précaire, plus on risque d’être confrontés à des épidémies similaires» explique la militante indienne.

Vandana Shiva insiste sur le lien entre le virus qui a arrêté le monde et la question environnementale.

«Tout est lié, il ne faut pas oublier cette leçon si on veut envisager la création d’un monde meilleur. Dans le fond, le virus et le changement climatique ont une origine commune : l’avidité humaine, la conviction que les ressources de la Terre n’ont pas de limites et qu’on peut les exploiter comme si de rien n’était».

«Si on décide de continuer au même rythme frénétique qu’avant, il suffira d’un siècle pour transformer la planète en un endroit hostile aux êtres humains, ce n’est pas à moi de le dire, mais la plupart des prévisions scientifiques sont plutôt unanimes sur ce point. Jusqu’à maintenant, nous nous sommes comportés comme les patrons de la planète, on a exploité la faune et la flore pour notre profit, nos modèles économiques voyaient les exigences environnementales comme un obstacle, un frein au développement. Si on maintient cette mentalité, dans un bref délai on ne sera qu’une énième espèce menacée d’extinction, comme des millions d’autres».

Mais Vandana n’aime pas endosser ce rôle de Cassandre, car les solutions existent, et pour les appliquer, il faut un changement radical de mentalité et une vraie volonté politique jusque-là très faible.

«Aujourd’hui c’est plus que jamais le moment de donner de l’espace aux femmes. Depuis des millénaires, les femmes ont le pouvoir et la connaissance dans l’univers du «prendre soin», du «care». Elles s’occupent de la maison, des enfants et dans beaucoup de pays, comme dans mon Inde natale, ce sont les femmes qui sèment dans les champs. Elles s’occupent de la vie, de son maintien, tout simplement. L’ancien concept de Pachamama (Mère Terre) est un concept féminin, lié à une nature qui donne la vie, qui en prend soin, alors qu’à l’opposé, la nature masculine est philosophiquement lié à l’idée de domination, et cette idée a été la plus puissante, jusqu’à maintenant. 

À l’aube de cette nouvelle ère post-pandémique, on devrait rétablir un équilibre.

Oui, mais l’urgence économique?

«La nature n’est que très peu intéressée par l’économie et ses lois, mais le problème est que sans la nature, l’économie s’écroulera, c’est simple : mettre l’économie devant la nature signifie manifester une vision à très court terme. Il y a beaucoup de choses qu’on doit protéger, beaucoup plus efficacement que ce qui a été fait jusqu’à maintenant : les forêts, les arbres, les ressources hydriques, – n’oublions pas que l’eau est déjà l’objet de terribles convoitises -, la biodiversité dans tous ses aspects. Pour arriver à cela, il faut être unis, la division apporte inévitablement la défaite. En Inde, nous avons réussi, seulement avec la détermination des paysans et des citoyens normaux, à freiner l’avidité des grandes multinationales, de celles qui voulaient imposer leur marque à la vie même, avec la commercialisation des graines.

La nature est très bien faite, elle se régénère toute seule, elle n’a pas besoin de brevets. Elle n’est pas la propriété des corporations. Notre association Navdanya en Inde procède dans ce sens, en valorisant le travail des femmes qui se sont réappropriées de la terre, avec leurs connaissances ancestrales, nous appuyons le travail éthique responsable de la terre. Métaphoriquement et concrètement, les femmes savent protéger les graines, la vie».

Selon Vandana, les modèles qui inspirent le monde des entreprises doivent changer, en revenant à une dimension locale. «Nous ne voulons plus d’une agriculture intensive dominée par les colosses de la chimie, secteur où les profits finissent dans les poches des grands actionnaires, le travail doit retrouver sa dimension humaine, il faut impérativement valoriser les réseaux locaux.

Il faut se rendre compte que après l’institution du WTO (World Trade Organization), le pouvoir des agriculteurs et des entreprises locales a chuté, a été piétiné, en Inde et comme ailleurs les paysans ont commencé à se suicider, ou à vivre dans la détresse et dans le plus grand dénuement».

L’activiste a son modèle spirituel : «Je crois dans les enseignements de Gandhi, il avait l’habitude de dire que nous avons tous le devoir de nous battre contre les injustices et pour y arriver, il ne faut pas attendre uniquement l’aide de l’État et des institutions. Chacun doit s’activer et les initiatives au niveau local verront croître leur importance et se révéleront fondamentales. Les acteurs locaux sont ceux qui connaissent le mieux le territoire, ses caractéristiques, ses exigences de manière approfondie. Leurs structures sont plus agiles, prêtes à agir par rapport à la bureaucratie lente et parfois inefficace des grandes institutions. Ces différentes petites structures locales devraient être capables d’établir un réseau d’interconnexion qui leur permette de s’unir, de se fortifier, qui puisse faire entendre leur voix et amplifier les demandes, sans trop les parcelliser.

Beaucoup de jeunes sont déjà en train d’oeuvrer dans ce sens et j’en suis admirative».

Le futur est dans leurs mains, aujourd’hui plus que jamais ? 

«En effet oui, c’est comme ça. Car eux, ils ont compris l’importance des enjeux environnementaux, ils savent ce qu’il y a à faire».

Propos receuillis par Eva Morletto

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Eva Morletto

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Journaliste et reporter depuis plus de 15 ans, Eva a été directrice éditoriale en Italie pour le magazine Life Club dédié à l’art de vivre et journaliste auprès de la boite de production « Filodiretto » pour qui elle a notamment réalisé différents documentaires sur les effets de la guerre dans l’Ex-Yougoslavie. En 2006 elle est arrivée à Paris comme reporter et news-producer pour la chaine de télévision japonaise FUJI TV. Après plusieurs années, elle est devenue correspondante pour Radio Montecarlo, elle a travaillé pour l’hebdomadaire d’actualité Famiglia Cristiana et pour le magazine GQ du groupe Condé Nast. En France elle collabore ponctuellement avec Radio France Culture, Radio France International, TV 5 Monde, CNews, Arte. En 2018 elle a gagné le prix « Reporter de Paix » auprès du Festival de Journalisme italien « Forum of Mediterranean Women Journalists », grâce à ses multiples reportages sur le djihadisme en France et sur la radicalisation. Aujourd’hui elle travaille régulièrement avec GRAZIA. Pour cet hebdomadaire italien, elle s’occupe d’actualité française, avec un oeil attentif sur les enjeux écologiques et les droits des femmes. Parallèlement à son activité journalistique, elle exerce comme traductrice et biographe privée. eva.morletto@gmail.com

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